Je vous propose ici une petite critique suivie de quelques réflexions personnelles sur le dernier film du réalisateur islandais Baltasar Kormakur : Everest.
Avant de rentrer dans le vif du sujet, je tiens à signaler que j’ai été voir ce film avec la crainte de revivre la même déception cinématographique qu’avec le film Wild. Et bien cela ne s’est pas vraiment passé de la même façon cette fois-ci… je vous laisse découvrir (pas de tracas, je ne dévoile rien du film même si les plus renseignés connaissent déjà la fin…) 😉
Il s’agit d’un film d’aventure américano-islando-britannique réalisé par Baltasar Kormákur, sorti ce 23 septembre 2015 et est l’adaptation du récit Tragédie à l’Everest (Into Thin Air: A Personal Account of the Mt. Everest Disaster) de Jon Krakauer, publié en 1997.
Un pitch rapide, simple et efficace, sans spoiler :
« En 1996, deux expéditions sur l’Everest sont confrontées à l’une des plus violentes tempêtes de neige de l’histoire. »
Voici la bande annonce du film, si vous ne voyez toujours pas de quoi je parle… 😉
Mon avis :
Une fois bien installé et ayant avalé déjà presque tous mes nachos avant le générique de début (oui je sais c’est casse-pieds quelqu’un qui mange des nachos à côté de vous au cinéma, mais je viens de le dire, le film n’avait pas encore commencé et moi, je mange en silence 🙂 ), je m’empresse de déposer le tout et de commencer l’expérience…
« L’homme n’est pas fait pour fonctionner en haut de l’Everest, là haut on ne vit pas, on survit. »
Dès le début, le ton est donné. Oubliez au plus vite les Cliffhanger ou Vertical Limit de ces dernières années, nous en sommes bien loin… Le film commence par une brève présentation des personnages, de leur environnement familial et d’un aperçu de leur motivations et fonctions dans le film. S’en suit une courte balade dans les rues de Katmandou et consort, saupoudrée de quelques belles images parfaitement filmées et quelques paysages à couper le souffle. On rajoute à cela quelques passages aux accents plus religieux et spirituels, qui font partie intégrante de l’expérience avec les sherpas croyants et les moines. Et hop, on a planté le décor. Je regrette sur le moment de ne pas en voir davantage moi qui apprécie cette civilisation, mais je me dis que on est pas là pour faire du tourisme…
En effet, une fois ceci passé hâtivement, on entre directement dans le vif du sujet : la préparation puis directement l’ascension vers le toit du monde… D’abord l’installation au campement, présentation des personnage secondaires, explications plus technique (mais pas trop) en vue de préparer l’expédition, bref, on vit la préparation et les craintes des personnages. Les liens établis avec les rôles secondaires (comme les épouses restées au pays) amènent davantage de sentiments humains.
L’ascension et la descente (aux enfers ?) sont rythmées et pour ma part stressantes. Je ne me suis pas ennuyé une seconde, j’ai même été à certains moments mal à l’aise car j’avais comme l’impression de revivre l’un ou l’autre passage alpin plus difficile rempli d’hésitation sur le moment.
Les fans d’alpinisme et de randonnée alpine comprendront mon ressenti…
Certaines scènes sont plus réalistes que d’autres. On trouvera toujours l’une ou l’autre erreur mais le tout semble réaliste et d’une extraordinaire esthétique. C’est un milieu difficile et glacial et on nous le rappelle avec des moments assez durs.
Les images sont superbes et la 3D amène davantage de profondeur dans celles-ci.
Je ne vais pas rentrer davantage dans les détails mais je peux affirmer que j’ai vraiment apprécié… 😉
Conclusion :
Everest est un film dur mais réaliste. Il réveillera chez certains d’entre nous un côté aventurier sans oublier de nous rappeler brutalement que nous ne sommes que des hommes et que nous sommes mortels. Un scénario catastrophe inspirés de faits réels qui fait froid dans le dos (joli jeu de mots n’est-ce pas?) mais qui nous offre malgré tout des images sublimes et surtout, qui nous fait réfléchir…
La course aux records, le commerce autour de ce mythe qu’est l’Everest, le manque de préparation, l’obstination, le dépassement de soi, l’attraction indescriptible de l’alpinisme pour les hauteurs infinies, savoir renoncer, faire demi-tour, faire des choix cruciaux, choisir ses priorités, etc. Toute une panoplie de sentiments et de situations que nous serons peut-être un jour amenés à vivre, si cela n’a pas déjà été le cas, notamment en tant que sportifs et randonneurs alpins ou non…
Et quand on se rappelle que l’histoire est réelle, on se sent comme submergé d’émotions conflictuelles : « qu’aurions-nous fait à leur place…?« .
Un scénario qui tient la route malgré quelques incohérences techniques et aberrations scénaristiques (qu’il est cependant difficile de modifier de par l’histoire réelle…), une brochette d’acteurs qui jouent leur rôle à la perfection, avec une mention spéciale pour Jason Clarke qui arrive a faire émaner de son personnage une humanité émouvante et Jake Gyllenhaal qui joue le type de personnage que j’adore : loubard et attachant.
Le tout rassemblé fait que Everest est l’un des meilleurs films que j’ai eu la chance de visionner cette année…
Réflexions…
Le danger des expéditions commerciales en altitude
Le film nous amène à nous poser quelques questions et notamment celle du danger des expéditions commerciales que ce soit sur l’Everest ou autres. L’Everest nourri de nombreux fantasmes et attire chaque année des centaines de grimpeurs du monde entier. Certains, peu expérimentés, tentent l’aventure au péril de leur vie, conscients (ou pas) des dangers. Cette commercialisation du Mont Everest a un tel succès que des embouteillages et des accidents surviennent de plus en plus régulièrement. Sans oublier l’exploitation et la mise en danger des sherpas qui acceptent de risquer leur vie pour assouvir les envies des clients…
La surexploitation du milieu, la pollution
Des déchets apparaissent de plus en plus aux abords des sommets, des cimetières de bonbonnes d’oxygènes, des restes de campements, leurs déchets, et malheureusement des cimetières à ciel ouvert ! En effet des dizaines de corps d’alpinistes expérimentés ou pas gisent le long des chemins depuis des années, car il est impossible de les redescendre…
> Un article criant de vérité de Pierre Longeray récemment rédigé sur VICE NEWS à ce sujet, que je vous invite à découvrir : Il y a beaucoup trop de monde sur l’Everest.
Savoir faire demi tour…
En visionnant le film, on a littéralement envie de crier à certains passages : « Fais demi-tour ! arrêtes tu vas te tuer !«
C’est malheureusement une notion que tout le monde n’a pas, savoir faire demi tour, jeune ou moins jeune et dans tous les domaines que ce soit dans le sport ou dans la vie de tous les jours… Une notion qui pour moi est bien présente et importante en randonnée quand la fatigue s’installe ou que les conditions sont mauvaises.
Ce film fait office d’une piqûre de rappel plutôt efficace pour ma part…
Info bonus :
Il est intéressant de noter que la plupart des acteurs ont subi un entraînement spécifique. Jake Gyllenhaal raconte qu’il a fait un test d’altitude simulée à 9 000 mètres avec Josh Brolin :
« On a fait un test d’altitude à 9 000 mètres pendant dix minutes dans un caisson et Josh et moi avons décidé de rester plus longtemps. On pensait qu’on pouvait le supporter, car on se sentait bien. On était en train de plaisanter sur le fait que ce n’était finalement pas si terrible quand tout à coup on en est sorti et on a immédiatement eu la nausée. Au cours des dix minutes qui ont suivi, on est passé d’un état assez joyeux à une profonde tristesse : cela nous a fait comprendre les effets puissants de l’altitude sur l’esprit ».
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Bon résumé ! Pour avoir vécu ma première expérience en alpinisme quelques semaines auparavant, j’ai complètement été immergé par le film. Un film qui tient en haleine. Je n’ai pas vu le temps passé. Cela fait bien longtemps que je n’avais plus eu ça pour un film « blockbuster ». Et comme tu dis, sous des dehors de film d’action, la problématique de la consommation de l’Everest est bien mis en avant. Les dangers également… C’est un film qui remet l’église au milieu du village pourtant je n’ai jamais autant envie de retourner braver les cimes qu’après avoir vu ce film !
Merci pour ton commentaire 😉
Immergé aussi, mais mal à l’aise, c’est personnel :p
Braver les cimes avec prudence et humilité…